Droit au bail

Droit au bail

Le droit au bail : un actif immatériel précieux pour les commerçants 

Vous êtes commerçant et vous souhaitez vendre votre fonds de commerce ? Ou peut-être envisagez-vous de reprendre un bail commercial existant ? Dans les deux cas, vous serez confronté à la notion de "droit au bail". Ce droit représente la valeur locative du local exploité, c'est-à-dire l'avantage que procure l'emplacement à l'activité commerciale. Un paramètre crucial qui conditionne souvent la réussite ou l'échec d'un commerce ! 

Mais au fait, comment se calcule le droit au bail ? Qui doit le payer et à quel moment ? Quelles sont les conséquences fiscales de sa cession ? Et peut-on le transférer à un autre locataire sans l'accord du bailleur ? 

Pas de panique, on vous explique tout sur cette notion incontournable des baux commerciaux !

Définition juridique du droit au bail 

Le droit au bail est un droit incorporel qui représente la valeur patrimoniale du bail commercial pour le locataire, indépendamment du fonds de commerce. C'est en quelque sorte le "prix" de la location, qui dépend de l'emplacement, de la surface, de la destination et du loyer du local. 

Plus précisément, le droit au bail est la contrepartie financière des avantages que le bail procure au locataire : 

⚈  Le droit d'occuper un local adapté à son activité. 

⚈  Le droit de bénéficier d'une clientèle et d'un chiffre d'affaires liés à l'emplacement. 

⚈  Le droit de renouveler le bail tous les 9 ans, sauf motif légitime du bailleur. 

⚈  Le droit de céder le bail à un autre locataire, avec l'accord du bailleur. 

⚈  Le droit d'être indemnisé en cas de refus de renouvellement ou d'éviction. 

Le droit au bail fait partie, avec le nom commercial, la clientèle et les équipements, des éléments incorporels qui composent la valeur d'un fonds de commerce. Mais il s'en distingue car il peut être cédé indépendamment du fonds, avec l'accord du bailleur. 

D'un point de vue comptable, le droit au bail constitue une immobilisation incorporelle qui figure à l'actif du bilan de l'entreprise locataire. Il doit être amorti sur la durée résiduelle du bail, et déprécié en cas de perte de valeur (baisse du chiffre d'affaires, travaux, changement de destination...). 

D'un point de vue fiscal, la cession du droit au bail est assimilée à une plus-value professionnelle imposable, sauf exonérations ou reports possibles. Sa TVA suit le régime du bail (exonéré ou soumis sur option). 

Exemple : Léa est locataire d'une boutique de prêt-à-porter dans une rue commerçante de Lyon, avec un bail 3-6-9 et un loyer de 2000 €/mois. Elle souhaite céder son bail à un repreneur pour changer d'activité. Le droit au bail est estimé à 50 000 €, soit l'équivalent de 2 ans de loyers. Léa devra payer des impôts sur cette plus-value, sauf à remployer le prix de cession dans une nouvelle activité.

L'évaluation et le paiement du droit au bail

Le droit au bail n'a pas de valeur fixe : il dépend des caractéristiques du local (emplacement, surface, état...), du montant du loyer, du nombre d'années restant à courir sur le bail, et surtout du potentiel commercial lié à la zone de chalandise (passants, accessibilité, concurrence...). 

Il existe plusieurs méthodes pour évaluer le droit au bail : 

⚈  La méthode comparative : elle consiste à se référer aux prix pratiqués pour des locaux similaires dans le même secteur. C'est la méthode la plus courante, mais elle nécessite des données fiables et actualisées. 

⚈  La méthode par le revenu : elle consiste à capitaliser le différentiel entre le loyer effectivement payé et la valeur locative de marché (VLM). Par exemple, si le loyer est de 20 000 €/an et la VLM de 30 000 €/an, avec un taux de rendement de 10%, le droit au bail vaudra : (30 000 - 20 000) / 10% = 100 000 €. 

⚈  La méthode forfaitaire : elle consiste à appliquer un multiple du loyer annuel (2 à 3 ans en moyenne) pour obtenir la valeur du droit au bail. C'est une méthode simple mais peu précise, car elle ne tient pas compte des spécificités du local. 

En pratique, c'est souvent un expert immobilier qui est chargé d'estimer le droit au bail, à l'occasion d'une cession de bail ou de fonds de commerce, d'une donation ou d'une succession. Son évaluation servira de base aux négociations entre le cédant et le repreneur. 

Le droit au bail est payé en une seule fois au moment de la cession du bail, en plus du pas- de-porte éventuel (droit d'entrée). Son montant est librement fixé par les parties, mais il doit correspondre à la réalité du marché locatif local. Un prix excessif ou dérisoire pourrait être requalifié par l'administration fiscale. 

C'est le nouveau locataire (cessionnaire) qui doit payer le droit au bail à l'ancien locataire (cédant), en contrepartie du transfert du bail et de la jouissance du local. Le bailleur n'intervient pas dans cette transaction, sauf à donner son accord et à percevoir éventuellement des indemnités (majoration de loyer, remise en état...). 

Bon à savoir : en cas de cession du bail avec le fonds de commerce, le droit au bail est inclus dans le prix de vente global. Son montant doit être distingué dans l'acte de cession, car il suit un régime fiscal différent. Il peut aussi être "neutralisé" pour alléger la fiscalité, mais attention aux redressements !

Les conséquences fiscales de la cession du droit au bail 

Côté cédant (ancien locataire), la cession du droit au bail constitue une plus-value professionnelle imposable, car il s'agit de la vente d'un élément de l'actif immobilisé. Cette plus-value est calculée par différence entre le prix de cession et la valeur nette comptable du droit au bail (valeur d'acquisition - amortissements). 

Elle est soumise au régime des plus-values à court terme (imposition au taux normal de l'IS ou de l'IR), sauf si le droit au bail est détenu depuis plus de 2 ans. Dans ce cas, elle relève du régime des plus-values à long terme, avec un taux réduit de 12,8% pour les sociétés, ou de 12,8% 17,2% de prélèvements sociaux pour les entreprises individuelles. 

Des exonérations sont possibles sous conditions : 

⚈  En cas de départ à la retraite du cédant (société ou entrepreneur individuel). 

⚈  En cas de cession de l'entreprise individuelle (fonds droit au bail) pour moins de 500 000 €. 

⚈  En cas de réinvestissement du prix de cession dans un nouveau fonds ou droit au bail dans les 2 ans. 

Côté cessionnaire (nouveau locataire), le droit au bail payé constitue le prix d'acquisition d'une immobilisation incorporelle. Il doit être inscrit à l'actif du bilan et amorti sur la durée résiduelle du bail. Il n'est pas déductible immédiatement. 

Exemple : Reprenons l'exemple de Léa qui cède son droit au bail pour 50 000 €. Elle l'avait acquis pour 30 000 € il y a 3 ans et l'a amorti à hauteur de 10 000 €. Sa plus-value imposable sera donc de : 50 000 - (30 000 - 10 000) = 30 000 €. Comme le droit est détenu depuis plus de 2 ans, elle sera taxée à 12,8% (si société) ou 12,8% 17,2% (si entreprise individuelle). Sauf si elle réinvestit les 50 000 € dans une nouvelle activité ! 

La cession du droit au bail sans l'accord du bailleur 

En principe, la cession du droit au bail (avec ou sans le fonds de commerce) nécessite l'accord préalable du bailleur, comme le prévoit l'article L.145-16 du code de commerce. Le locataire doit lui notifier son projet de cession par acte extrajudiciaire ou LRAR, en précisant l'activité du cessionnaire pressenti. Le bailleur a alors 3 mois pour donner sa réponse, qui doit être motivée en cas de refus. 

Toutefois, la loi prévoit deux exceptions où le locataire peut céder son bail sans l'accord du bailleur : 

⚈ En cas de cession du bail à l'acquéreur du fonds de commerce, si le bail autorise la cession du fonds (clause de libre cession). Le bailleur ne peut s'y opposer, sauf motif grave et légitime (activité interdite, non-respect des obligations...). 

⚈ En cas de cession du bail au conjoint ou aux héritiers du locataire, en cas de décès, de divorce ou de dissolution de la société locataire. Cette cession forcée est d'ordre public, le bailleur ne peut la refuser. 

En dehors de ces cas, céder son bail sans accord est très risqué : le bailleur peut demander la nullité de la cession et la résiliation du bail pour inexécution. Il peut aussi exiger l'expulsion du sous-locataire ou la restitution des lieux. De lourdes sanctions pour le cédant ! 

Mieux vaut donc toujours informer et impliquer le bailleur en amont d'une cession de bail. Des négociations sur le loyer, la destination, les travaux ou la durée du bail peuvent faciliter son accord et sécuriser l'opération. Le dialogue est la clé !

Guy Hoquet répond à vos questions sur le droit au bail 

Le montant du droit au bail est très variable selon la localisation, le type de local et l'activité concernée. En moyenne, il représente entre 1 et 3 ans de loyer hors charges et hors taxes. Par exemple, pour un loyer de 2000 €/mois (24 000 €/an), le droit au bail se situera entre 24 000 et 72 000 €. Mais il peut être bien plus élevé pour les emplacements très recherchés (centres-villes, zones touristiques, galeries commerciales...) où la valeur locative est forte. À l'inverse, il sera plus faible dans les secteurs moins attractifs ou pour les locaux atypiques. Seule une estimation par un professionnel permet d'avoir une valeur fiable et actualisée. N'hésitez pas à demander une expertise avant toute cession ! 
Oui, le droit au bail doit être amorti sur la durée résiduelle du bail, et non sur la durée d'utilisation du bien (sauf si elle est plus courte). Par exemple, si vous reprenez un bail 3-6-9 qui a déjà couru 4 ans, pour un droit au bail de 50 000 €, vous devrez l'amortir sur les 5 ans restants jusqu'au prochain renouvellement. Le montant de l'amortissement annuel sera donc de 50 000 / 5 = 10 000 €. Cet amortissement est déductible du résultat fiscal, mais il n'est pas obligatoire comptablement. Vous pouvez aussi constater une provision pour dépréciation si la valeur du droit au bail diminue en cours de bail. À noter : en cas de cession du bail avant la fin de la durée d'amortissement, la valeur nette comptable du droit au bail (valeur d'acquisition - amortissements) sera déduite du prix de cession pour calculer la plus ou moins-value. 
Oui, comme toute cession de bail commercial, la cession du droit au bail doit être publiée au registre du commerce et des sociétés (RCS) dans les 15 jours, que le fonds soit cédé ou non. Cette formalité permet d'informer les tiers et de rendre la cession opposable. La publication se fait au greffe du tribunal de commerce du lieu du fonds, par dépôt d'un formulaire M3 (cession de bail) et des pièces justificatives (acte de cession, état des inscriptions, attestation de parution dans un journal d'annonces légales...). Son coût est d'environ 200 €. À défaut de publication dans le délai, la cession reste valable entre les parties mais est inopposable aux tiers. Le bailleur pourrait alors réclamer les loyers au cédant, les créanciers inscrire des nantissements, etc. Un risque à ne pas négliger ! 
Non, le droit au bail n'est dû que par le nouveau locataire en cas de cession du bail. Lorsque le propriétaire vend le local occupé par un locataire titulaire d'un bail commercial, il n'y a pas de droit au bail à payer. Le nouveau propriétaire est seulement tenu de respecter le bail en cours et notamment :  
⚈  De maintenir le locataire dans les lieux jusqu'au terme du bail.  
⚈  De délivrer un congé avec offre de renouvellement à son échéance.  
⚈  De payer l'indemnité d'éviction en cas de refus de renouvellement.  
La vente n'a pas d'incidence sur le montant du loyer ni sur les autres conditions du bail. Ce n'est que lors du renouvellement que le nouveau bailleur pourra les renégocier. 
Seul cas particulier : si le bail commercial contient une clause de substitution automatique (clause d'attribution), le propriétaire peut à tout moment se substituer au locataire pour exploiter lui-même le fonds. Il doit alors lui verser une indemnité égale à la valeur du droit au bail et du fonds. Mais c'est très rare en pratique !

L'essentiel à retenir sur le droit au bail 

1. Le droit au bail est la valeur patrimoniale que représente le bail commercial pour le locataire. C'est un actif incorporel qui fait partie du fonds de commerce, mais peut être cédé séparément. 

2. Son montant dépend de l'emplacement, de la surface, du loyer et du potentiel commercial du local. Il se calcule généralement par comparaison ou en fonction du différentiel entre le loyer et la valeur locative de marché. 

3. Il est payé en une seule fois par le nouveau locataire lors de la cession du bail. Son prix est librement fixé par les parties, mais doit refléter la réalité du marché pour éviter une requalification fiscale. 

4. Pour le cédant, la cession du droit au bail est une plus-value professionnelle imposable, au taux normal ou réduit selon la durée de détention. Des exonérations sont possibles en cas de départ à la retraite, de réinvestissement... 

5. La cession du bail (avec ou sans le fonds) nécessite en principe l'accord préalable du bailleur. À défaut, elle est nulle et le bail peut être résilié. La cession doit être publiée au RCS sous 15 jours pour être opposable aux tiers. 

Vous l'aurez compris, le droit au bail est un élément clé pour valoriser un fonds de commerce et sécuriser l'exploitation d'un local. Sa maîtrise est indispensable pour tout commerçant qui souhaite céder ou reprendre un bail. 

Mais attention, entre l'estimation de sa valeur, la négociation avec le bailleur, les formalités administratives et les enjeux fiscaux, une cession de droit au bail ne s'improvise pas ! Mieux vaut se faire accompagner par des professionnels aguerris (expert immobilier, avocat, comptable...) pour éviter les pièges. 

Et si vous êtes propriétaire bailleur, pensez à bien cadrer les conditions de cession du bail dans le contrat, pour garder la main sur le choix du locataire et la destination des lieux. Un bail bien rédigé, c'est la clé d'une location commerciale sereine ! N'hésitez pas à solliciter l’agence immobilière Guy Hoquet la plus proche pour toute question sur les baux commerciaux et les cessions de droit au bail. Son expertise et son réseau sont à votre service pour valoriser votre patrimoine professionnel !

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