Marchand de biens

Marchand de biens

Le marchand de biens : un acteur clé du négoce immobilier

Vous avez peut-être déjà entendu parler de ces professionnels de l'immobilier qui achètent pour revendre, souvent après avoir rénové ou divisé le bien. Ou de ces chasseurs de bonnes affaires qui dénichent les logements ou les terrains à fort potentiel. Ce sont les fameux marchands de biens ! Un métier méconnu mais essentiel dans le secteur de la transaction immobilière.

À mi-chemin entre le promoteur et l'agent immobilier, le marchand de biens est un commerçant qui fait profession d'acheter des biens pour les revendre avec une plus-value, en l'état ou après travaux. Une activité lucrative mais risquée, qui nécessite un grand sens du marché et une solide trésorerie.

Quel est le statut du marchand de biens ? Quelles opérations peut-il réaliser ? Comment est-il taxé sur ses revenus ? Et quelles garanties offre-t-il à ses clients ? Lumière sur ce métier de l'ombre avec Guy Hoquet.

Définition : qu'est-ce qu'un marchand de biens ?

Un marchand de biens est un professionnel de l'immobilier dont l'activité habituelle est l'achat de biens immobiliers en vue de leur revente, avec une intention spéculative. Il agit en son nom propre et pour son compte, avec l'objectif de réaliser un bénéfice sur la différence entre le prix d'acquisition et le prix de cession du bien.

Son intervention se distingue :

  • de celle d'un promoteur immobilier qui achète un terrain pour y construire des logements neufs et les vendre
  • de celle d'un agent immobilier qui met en relation des vendeurs et des acheteurs moyennant une commission, sans acheter lui-même les biens
  • de celle d'un simple particulier qui achète un bien pour le revendre occasionnellement (opération isolée)

L'activité de marchand de biens est par nature commerciale et spéculative. Elle suppose :

  • une intention d'acheter pour revendre dès l'acquisition du bien, et non de le conserver durablement
  • des achats et reventes répétés et habituels, formant un cycle commercial continu
  • un but lucratif visant à dégager une marge bénéficiaire sur chaque opération

Le marchand de biens intervient sur tous types de biens immobiliers :

  • terrains à bâtir (lotissement, division parcellaire)
  • immeubles anciens (rénovation, mise aux normes, changement d'usage)
  • logements (remise en état, défiscalisation)
  • locaux commerciaux et professionnels (aménagement, location)

Son activité consiste à identifier des biens à fort potentiel de plus-value (emplacement, travaux, division...), à les acquérir à un prix attractif, à réaliser éventuellement des travaux de rénovation ou d'amélioration, puis à les revendre à un prix supérieur dans un délai assez court (quelques mois à quelques années).

Le marchand de biens doit disposer de fonds propres importants pour financer ses acquisitions et travaux, en complément des prêts bancaires. Il doit aussi avoir une bonne connaissance du marché immobilier local pour évaluer le potentiel de revente des biens et fixer leur prix.

Son statut est celui d'un commerçant soumis aux obligations du Code de commerce : immatriculation au RCS, tenue d'une comptabilité, TVA, garantie décennale, assurance professionnelle... Il relève d'un régime fiscal spécifique pour l'imposition de ses revenus (impôt sur les sociétés ou BIC avec comptabilité d'engagement).

Exemple fictif : La SARL Immo Partners, marchand de biens, achète une maison ancienne pour 200 000 € dans un quartier prisé de Bordeaux. Après 50 000 € de travaux de rénovation et de mise aux normes, elle revend le bien 350 000 € un an plus tard, dégageant une plus-value brute de 100 000 € (350 000 - 250 000).

Les opérations réalisées par le marchand de biens

Le marchand de biens peut réaliser plusieurs types d'opérations immobilières, seul ou en partenariat avec d'autres professionnels (promoteurs, agents immobiliers, architectes...) :

  • Achat-revente de terrains :
    • acquisition de terrains nus (agricoles, forestiers) ou à bâtir
    • obtention d'un permis d'aménager ou de construire
    • viabilisation et division en lots (lotissement)
    • revente des parcelles en l'état ou après travaux à des particuliers ou des promoteurs
  • Achat-revente d'immeubles anciens :
    • acquisition d'immeubles vétustes ou mal entretenus
    • réalisation de travaux de rénovation, de mise aux normes, de restructuration
    • changement éventuel d'usage (transformation de bureaux en logements)
    • revente à la découpe (lots de copropriété) ou en bloc à des investisseurs
  • Achat-revente de logements :
    • acquisition d'appartements ou de maisons à rénover
    • remise en état (rafraîchissement, modernisation, aménagement)
    • mise en conformité (électricité, plomberie, performance énergétique)
    • défiscalisation (Pinel, Malraux, Monument Historique...)
    • revente à des particuliers occupants ou bailleurs
  • Achat-revente de locaux commerciaux ou professionnels :
    • acquisition de boutiques, bureaux, entrepôts...
    • réalisation de travaux d'aménagement ou de sécurisation
    • location temporaire en bail précaire ou dérogatoire
    • revente à des commerçants, artisans ou professions libérales
  • Marchands de listes :
    • signature d'un compromis de vente avec un vendeur
    • recherche d'un acquéreur avant la signature de l'acte authentique
    • cession du compromis (et non du bien) à l'acquéreur avec une plus-value
    • opération risquée car le vendeur peut se rétracter avant la vente définitive

Ces opérations supposent une bonne maîtrise des techniques juridiques (droit immobilier, urbanisme, copropriété...), fiscales (TVA, plus-values, droits d'enregistrement...) et financières (montage, négociation bancaire...) propres à chaque type de bien. Elles exigent aussi une grande réactivité pour saisir les bonnes affaires et les conclure rapidement.

Le régime fiscal du marchand de biens

Sur le plan fiscal, le marchand de biens relève d'un régime spécifique distinct de celui des promoteurs ou des agents immobiliers.

S'il exerce en entreprise individuelle, ses revenus sont imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) selon un régime de bénéfice réel et une comptabilité d'engagement (et non de caisse). Cela signifie que les achats et les ventes sont comptabilisés à la date de signature des actes, même si les flux financiers sont décalés.

Le résultat imposable est égal à la différence entre les recettes (prix de vente) et les dépenses (prix d'acquisition, frais d'acte, travaux, intérêts d'emprunt...) rattachées à l'exercice fiscal. Un stock immobilier est constitué à l'actif du bilan pour les biens en cours de détention.

Les profits sont soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu après application d'un abattement forfaitaire pour frais de 50%. Les prélèvements sociaux (17,2% en 2023) sont aussi dus.

Si le marchand de biens exerce via une société (SARL, SAS...), les bénéfices sont soumis à l'impôt sur les sociétés (IS) au taux de 15% jusqu'à 38 120 € de bénéfices, puis 25% au-delà (taux réduit à 15% pour les PME). La contribution économique territoriale (CET) est aussi applicable.

L'activité de marchand de biens est en principe soumise à la TVA immobilière au taux de 20% (ou 10% pour certains logements sociaux ou intermédiaires). Mais des exonérations existent pour les terrains non viabilisés, les immeubles achevés depuis plus de 5 ans, ou les ventes à des non assujettis.

Le marchand de biens peut aussi être éligible à certains dispositifs de défiscalisation immobilière (Pinel, Malraux, Monument Historique...) s'il respecte leurs conditions (localisation, performance énergétique, durée de location...), en complément de son activité commerciale.

Compte tenu de ces spécificités, il est crucial de se faire bien accompagner par un expert-comptable spécialisé dans l'immobilier pour optimiser sa fiscalité et sécuriser ses déclarations.

Les garanties et responsabilités du marchand de biens

Comme tout professionnel intervenant dans l'acte de construire ou de rénover, le marchand de biens est soumis à des obligations légales visant à protéger ses clients :

  • Garantie décennale : il est responsable pendant 10 ans des dommages qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou le rendent impropre à sa destination (gros oeuvre, étanchéité, équipements indissociables...). Il doit souscrire une assurance décennale pour couvrir ce risque.
  • Garantie de bon fonctionnement : il est responsable pendant 2 ans du bon fonctionnement des éléments d'équipement dissociables (volets, portes, robinets...). L'assurance décennale peut être étendue à cette garantie.
  • Garantie de parfait achèvement : pendant 1 an après la réception des travaux, il doit réparer tous les désordres signalés par le client (malfaçons, finitions...). Au-delà, le client peut faire jouer la garantie décennale ou biennale.
  • Responsabilité civile professionnelle : il doit souscrire une assurance couvrant les dommages causés à des tiers dans l'exercice de son activité (accidents, erreurs, négligences...).
  • Obligation d'information et de conseil : il est tenu de délivrer à ses clients toutes les informations utiles sur le bien vendu (surface, état, diagnostics...) et de les conseiller sur les aspects juridiques, fiscaux et techniques de l'opération. Sa responsabilité peut être engagée en cas de manquement.
  • Obligation de garantie d'achèvement : en cas de vente en l'état futur d'achèvement (VEFA), il doit fournir à l'acheteur une garantie bancaire assurant le financement de l'achèvement des travaux en cas de défaillance.

Le marchand de biens est aussi soumis au droit de rétractation de 10 jours dont bénéficie l'acquéreur non professionnel dans le cadre d'une vente immobilière. Un délai pendant lequel il ne peut pas exiger de contrepartie financière.

Pour sécuriser ses opérations et rassurer ses clients, le marchand de biens a donc tout intérêt à s'entourer de professionnels fiables (architectes, bureaux d'études, entreprises de travaux...) et à souscrire des assurances solides. Sa réputation en dépend !

Guy Hoquet répond à vos questions sur le marchand de biens

Non, contrairement à l'agent immobilier, le marchand de biens n'est pas soumis à l'obligation de détenir une carte professionnelle. Son activité n'est pas réglementée par la loi Hoguet.
Cependant, il doit s'immatriculer au registre du commerce et des sociétés (RCS) en tant que commerçant, et se déclarer au centre de formalités des entreprises (CFE) compétent. Il est aussi assujetti à la TVA immobilière et doit tenir une comptabilité commerciale.
Certains marchands de biens choisissent néanmoins de passer la carte professionnelle "Transactions sur immeubles et fonds de commerce" pour pouvoir exercer également une activité d'intermédiation immobilière (négociation, gestion locative...).
Comme tout professionnel intervenant dans l'acte de construire, le marchand de biens est soumis à plusieurs obligations légales visant à protéger ses clients :
  • la garantie décennale pendant 10 ans pour les désordres affectant la solidité ou la destination de l'ouvrage
  • la garantie de bon fonctionnement pendant 2 ans pour les éléments d'équipement dissociables
  • la garantie de parfait achèvement pendant 1 an après réception pour tous les désordres réservés
  • une assurance responsabilité civile professionnelle couvrant les dommages causés aux tiers
  • un devoir d'information et de conseil sur les aspects juridiques, fiscaux et techniques de l'opération
En cas de vente en l'état futur d'achèvement (VEFA), il doit aussi fournir une garantie financière d'achèvement des travaux. 
Le non-respect de ces obligations engage sa responsabilité civile et pénale.
Oui, un marchand de biens peut tout à fait acheter un logement éligible au dispositif Pinel pour le louer pendant 6, 9 ou 12 ans et bénéficier d'une réduction d'impôt pouvant aller jusqu'à 21% du prix.
Cependant, ce logement ne doit pas faire partie de son stock immobilier affecté à son activité commerciale. Il doit être inscrit dans son patrimoine privé et loué nu à usage d'habitation principale.
Les conditions du Pinel (localisation en zone tendue, niveau de performance énergétique, plafonds de loyer et de ressources des locataires...) doivent aussi être respectées.
Ce type d'opération ne relève donc pas directement de l'activité de marchand de biens, qui a pour objet l'achat pour revendre. Mais elle peut constituer un complément de revenus et une source de défiscalisation intéressante.
Oui, comme tout acquéreur immobilier, le marchand de biens peut se voir opposer le droit de préemption urbain (DPU) par la commune sur le territoire de laquelle se situe le bien.
Ce droit permet à la collectivité de se substituer à l'acquéreur initial pour réaliser une opération d'aménagement d'intérêt général (logement social, équipement public, espace vert...).
Avant de signer une promesse de vente, le marchand de biens doit donc interroger la mairie pour savoir si le bien est soumis au DPU. Si c'est le cas, la commune disposera de 2 mois pour décider de préempter ou non après notification de la vente par le notaire.
Pour éviter ce risque, le marchand de biens peut cibler des biens situés hors des périmètres de préemption définis par le Plan Local d'Urbanisme (PLU), ou pour lesquels la commune aura renoncé à son droit de priorité.

L'essentiel à retenir sur le marchand de biens

  1. Le marchand de biens est un professionnel de l'immobilier qui achète des biens pour les revendre avec une plus-value, après ou sans travaux. Son activité est de nature commerciale et spéculative.
  2. Il intervient sur tous types de biens : terrains, immeubles anciens, logements, locaux commerciaux... Son objectif est de dégager une marge bénéficiaire en achetant au meilleur prix et en revendant le plus cher possible.
  3. Son statut est celui d'un commerçant soumis aux règles du Code de commerce (RCS, comptabilité, TVA...). Il relève d'un régime fiscal spécifique : imposition des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) selon une comptabilité d'engagement.
  4. Il est soumis à des obligations légales visant à protéger ses clients : garantie décennale, assurance professionnelle, devoir d'information et de conseil... Sa responsabilité civile et pénale peut être engagée.
  5. Métier méconnu mais essentiel du secteur immobilier, le marchand de biens conjugue sens du marché, réactivité, expertise technique et rigueur de gestion. Un professionnel à connaître pour dénicher la bonne affaire !

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