Résiliation

Résiliation

La résiliation : un mode de rupture anticipée des contrats immobiliers

Vous êtes locataire d'un logement et vous souhaitez quitter les lieux avant la fin du bail ? Vous avez confié un mandat de vente à une agence immobilière mais vous voulez y mettre un terme de façon prématurée ? Vous allez devoir procéder à une "résiliation", c'est-à-dire à la rupture anticipée et définitive du contrat qui vous lie à votre cocontractant (bailleur, agent immobilier...).

La résiliation est une cause d'extinction du contrat immobilier qui intervient avant son échéance normale, par la volonté d'une ou des deux parties, en raison d'un événement particulier ou d'un motif légitime. Elle met fin aux effets futurs du contrat, sans remettre en cause ce qui a déjà été exécuté.

Mais quels sont les différents cas de résiliation prévus par la loi en matière immobilière ? Quelles sont les démarches et précautions à suivre ? Et quelles sont les conséquences de la résiliation sur les droits et obligations des parties ? Éclairage par Guy Hoquet.

Définition : qu'est-ce que la résiliation dans l'immobilier ?

La résiliation est l'acte juridique par lequel une ou plusieurs parties à un contrat immobilier à exécution successive (bail, mandat, assurance habitation, prêt...) décident d'y mettre fin de façon anticipée et définitive, avant le terme initialement prévu.

C'est l'une des causes d'extinction des contrats immobiliers, au même titre que l'arrivée du terme, la nullité, la caducité ou la révocation. Mais elle s'en distingue par son caractère volontaire et ses effets pour l'avenir (et non rétroactifs).

La résiliation peut intervenir dans différents types de contrats liés au logement :   

  •  Les baux d'habitation (location nue ou meublée) : le locataire ou le bailleur peuvent résilier le bail de façon anticipée dans certains cas et conditions (départ, vente, motif légitime...). 
  • Les baux commerciaux (local commercial) : le preneur peut résilier le bail tous les 3 ans, le bailleur ne le peut qu'en cas de faute ou à l'échéance du bail. 
  • Les mandats de vente immobilière : le vendeur peut résilier le mandat confié à l'agence à tout moment, l'agent ne le peut qu'en cas d'inexécution par le mandant.
  • Les contrats d'assurance habitation : l'assuré et l'assureur peuvent résilier annuellement ou après sinistre, ou en cas de vente du bien, changement de situation...
  • Les prêts immobiliers : l'emprunteur peut résilier son offre ou son contrat de crédit dans un délai de rétractation ou de réflexion, la banque ne le peut qu'en cas d'impayé.

La résiliation d'un contrat immobilier suppose en général une manifestation de volonté expresse, par oral ou par écrit (lettre, acte...) notifiée au cocontractant. Elle peut résulter d'un commun accord (résiliation amiable) ou d'une décision unilatérale fondée sur la loi ou le contrat (départ, inexécution...).

Ses effets sont en principe non-rétroactifs (contrairement à la nullité) : le contrat cesse de créer des obligations pour l'avenir, sans remettre en cause ce qui a déjà été payé ou exécuté. Mais la résiliation peut parfois justifier des restitutions ou indemnités.

Exemple : Lucie est locataire d'un appartement avec un bail de 3 ans. Au bout d'un an, elle est mutée professionnellement dans une autre ville. Elle envoie une lettre recommandée de congé à son bailleur avec un préavis réduit à 1 mois. Son bail sera résilié à l'issue de ce délai, sans possibilité pour le propriétaire de s'y opposer. C'est une résiliation unilatérale anticipée pour motif légitime, prévue par la loi.  

Les différents cas de résiliation des contrats immobiliers

En matière immobilière, la résiliation des contrats peut intervenir dans plusieurs hypothèses, plus ou moins encadrées par la loi.

  1. La résiliation des baux d'habitation

  • Pour les locations nues (résidence principale), le locataire peut résilier le bail à tout moment en donnant congé, sans avoir à justifier d'un motif. Il doit respecter un préavis de 3 mois, réduit à 1 mois en cas de mutation, perte d'emploi ou situation d'urgence (santé, handicap...).
  • De son côté, le bailleur ne peut donner congé que pour 3 motifs légaux : reprise pour habiter ou loger un proche, vente du logement, motif légitime et sérieux (impayés, troubles, travaux...). Le congé doit être motivé et respecter un préavis de 6 mois.
  • Pour les locations meublées (dont bail mobilité), le locataire peut aussi résilier à tout moment avec un préavis d'1 mois. Le bailleur a les mêmes motifs de reprise, vente ou faute mais avec un préavis allégé.
  • La résiliation amiable du bail est toujours possible, elle suppose un écrit et un accord des deux parties sur ses modalités (date d'effet, préavis, charges, remise des clés...).

  1. La résiliation des baux commerciaux   

  • Le preneur a la faculté de donner congé à l'expiration de chaque période triennale du bail (tous les 3 ans), en respectant un préavis de 6 mois notifié par acte extrajudiciaire. Il n'a pas à motiver sa décision. 
  • Le bailleur ne peut pas résilier le bail en cours de période, sauf clause résolutoire en cas d'inexécution des obligations ou de faillite du preneur. Il doit agir en justice. 
  • En fin de bail, le bailleur peut refuser le renouvellement en donnant un congé motivé 6 mois avant l'échéance, uniquement pour reprise, reconstruction ou motif grave et légitime. Il devra une indemnité d'éviction (sauf exceptions).  

  1. La résiliation des mandats de vente immobilière   

  • Le mandant (vendeur) peut révoquer à tout moment le mandat de vente confié à un agent immobilier, sans préavis ni indemnité (sauf clause contraire). La révocation doit être expresse et non équivoque (écrit conseillé). 
  • L'agent immobilier ne peut pas renoncer de lui-même au mandat, sauf en cas d'inexécution par le vendeur de ses obligations contractuelles (loyauté, information, rémunération...). 
  • Un mandat sans exclusivité accordé à plusieurs agents prend fin automatiquement à la première vente, sans formalité. La résiliation des autres mandats est implicite.

  1. La résiliation des contrats d'assurance habitation   

  • L'assuré peut résilier son contrat à tout moment, après un an de souscription, en respectant un préavis de 2 mois. Il peut aussi le faire à l'échéance annuelle avec le même préavis, ou en cas de changement de situation (déménagement, vente, mariage...).
  • L'assureur ne peut résilier qu'à l'échéance annuelle avec un préavis de 2 mois, et pour des motifs restreints : non-paiement des primes, aggravation du risque, fausse déclaration, résiliation après sinistre...

  1. La résiliation des prêts immobiliers   

  • L'emprunteur bénéficie d'un délai de rétractation de 10 jours après la signature de l'offre de crédit pendant lequel il peut renoncer sans frais. Passé ce délai, il a encore un droit de réflexion de 10 jours avant la signature de l'acte authentique chez le notaire.
  • En cours de prêt, l'emprunteur peut procéder à un remboursement anticipé total ou partiel de son crédit, moyennant parfois une indemnité limitée. C'est une forme de résiliation.
  • La banque ne peut "résilier" le contrat qu'en cas de défaillance caractérisée de l'emprunteur (non-paiement des échéances). Elle doit le mettre en demeure de régulariser avant de prononcer la déchéance du terme.

Pour tous ces contrats, les modalités précises de résiliation (forme, délai, destinataire...) sont en général fixées par la loi ou à défaut par le contrat. Des clauses peuvent prévoir des cas spécifiques de rupture (clause résolutoire...).   

La résiliation abusive, détournée ou discriminatoire peut être sanctionnée par des dommages-intérêts. À l'inverse, une résiliation empêchée ou retardée sans motif peut aussi justifier une indemnisation.

Les formalités et précautions à respecter pour résilier un contrat immobilier

Résilier un bail, un mandat ou une assurance n'est pas un acte anodin. Cela suppose de respecter certaines règles de forme et de fond, variables selon le contrat.

Sur la forme, la résiliation se fait en général par l'envoi d'une notification écrite (pour des raisons de preuve) :

  • Lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR) : c'est le mode le plus courant et sécurisé. La date de première présentation de la LRAR vaut date de notification.
  • Acte d'huissier : c'est un mode plus solennel qui permet d'obtenir une signification de l'acte à personne ou à domicile, avec une date certaine.
  • Lettre simple ou courrier électronique : la preuve de l'envoi et de la réception est plus délicate, un écrit est préférable à l'oral. Un avis de réception est conseillé. 

La notification doit être adressée à la personne habilitée (bailleur, mandataire, assureur...) à sa dernière adresse connue. Un délai raisonnable est requis pour qu'elle puisse en prendre connaissance.

Sur le fond, la résiliation doit respecter un certain formalisme

  • Mention des parties au contrat avec leur qualité (nom, prénom, adresse...). 
  • Référence du contrat résilié (bail, mandat, police...) avec sa date. 
  • Motif de la résiliation s'il est requis par la loi ou le contrat (départ, vente, non-paiement...). 
  • Date d'effet de la résiliation compte tenu du délai de préavis légal ou contractuel (1, 2, 3, 6 mois...). 
  • Modalités pratiques : restitution des clés, état des lieux, paiement des loyers/charges/primes, sort du dépôt de garantie... 
  • Formule de politesse avant signature.

Il est vivement conseillé de conserver une copie de la notification de résiliation ainsi que l'accusé de réception ou le récépissé, pour constituer une preuve en cas de litige.

Avant de notifier une résiliation, il importe aussi de bien vérifier :

  • Que le contrat est résiliable (durée déterminée ou indéterminée) et qu'on en a le droit. 
  • Que le motif de résiliation est légitime et prévu par la loi ou le contrat. 
  • Que le préavis et les formalités contractuelles sont respectés (LRAR, acte...). 
  • Que la date d'effet choisie est compatible avec les obligations post-contractuelles (restitution, état des lieux, paiement...). 
  • Que les conséquences de la résiliation sont anticipées (perte de droits, de garanties, d'indemnités, relogement...).

Il faut éviter les résiliations prématurées (avant le délai minimal), tardives (après l'échéance) ou infondées qui peuvent entraîner des pénalités. En cas de doute, n'hésitez pas à vous faire assister par un professionnel (agent immobilier, avocat...).  

Les conséquences de la résiliation des contrats immobiliers

La résiliation n'est pas une fin en soi : elle entraîne des conséquences immédiates et futures sur les droits et obligations des parties, qu'il faut bien mesurer.

Ainsi, la résiliation d'un bail implique concrètement pour le locataire de :

  • Libérer le logement de ses meubles et occupants à la date prévue. 
  • Effectuer un état des lieux de sortie contradictoire avec le bailleur pour constater l'état du bien. 
  • Restituer les clés et les dispositifs d'accès (badges, télécommandes...). 
  • Relever les compteurs (eau, gaz, électricité) et résilier les abonnements correspondants. 
  • Payer les loyers, charges et réparations jusqu'à la fin du préavis et la remise des clés. 
  • Faire suivre son courrier et actualiser ses contrats (assurance, impôts, banque...). 
  • Récupérer son dépôt de garantie (1 mois après remise des clés, 2 mois s'il y a des dégradations).

Et pour le bailleur de :

  • Procéder à l'état des lieux et récupérer les clés. 
  • Vérifier le paiement des loyers et charges jusqu'au départ effectif. 
  • Relouer le bien avec de nouveaux diagnostics, une remise en état et une assurance PNO. 
  • Restituer le dépôt de garantie dans les délais légaux, déduction faite des sommes dues.

La résiliation d'un mandat de vente par le vendeur implique pour lui de :

  • Notifier la résiliation à l'agent par LRAR en réclamant les justificatifs des diligences accomplies. 
  • Récupérer les documents, instruments et produits confiés à l'agent (clés, dossier, panneaux...). 
  • Payer les frais et honoraires dus jusqu'à la résiliation (publicités, visites...) sauf faute de l'agent. 
  • Vérifier les actes accomplis par l'agent avant la résiliation (offres d'achat, compromis...) qui restent opposables. 
  • Résilier les autres mandats de vente en cours, le cas échéant. 
    • Pour l'agent immobilier, la résiliation implique de : 
  • Cesser les démarches de commercialisation du bien (annonces, visites...). 
  • Restituer les éléments confiés par le vendeur (dossier, clés...) ainsi que les double des mandats. 
  • Informer les acquéreurs potentiels que le bien n'est plus à vendre (sauf clause de rétro-commissions). 
  • Facturer les frais et honoraires dus jusqu'à la résiliation. 
    • La résiliation d'un contrat d'assurance habitation par l'assuré suppose de : 
  • Souscrire une nouvelle assurance avant la prise d'effet de la résiliation, pour éviter une interruption de garantie. 
  • Payer les primes jusqu'à la résiliation. 
  • Déclarer tout nouveau sinistre survenu avant la résiliation. 
  • Récupérer la part de prime non consommée au prorata temporis.

Et pour l'assureur de :

  • Couvrir les sinistres survenus jusqu'à la date de résiliation. 
  • Ristourner les primes trop-perçues
  • Proposer un nouveau contrat ou une alternative. 
    • La résiliation d'un crédit immobilier par l'emprunteur implique de : 
  • Notifier sa rétractation dans les délais légaux. 
  • Restituer les fonds prêtés s'ils ont été versés. 
  • Payer les intérêts et frais proportionnels dus jusqu'à la rétractation. 
  • Justifier du remboursement anticipé en cas de vente du bien financé.

Et pour le prêteur de :

  • Stopper le versement des fonds et les prélèvements. 
  • Rembourser les frais de dossier et d'assurance sauf en cas d'acceptation de l'offre. 
    • Au-delà de ces démarches immédiates, la résiliation peut aussi avoir des conséquences à long terme qu'il faut évaluer avant de s'engager :
  • Perte de droits et d'avantages liés au contrat résilié (renouvellement du bail, maintien dans les lieux, garanties, taux...). 
  • Difficulté à retrouver une offre équivalente (tarif, prestations, couverture...). 
  • Frais et formalités pour conclure un nouveau contrat (frais d'agence, dossier, caution...). 
  • Obligation de déclarer la résiliation à certains tiers (impôts pour un déménagement, CAF pour l'APL, banque pour l'assurance du prêt...). 
  • Impact sur la situation personnelle (déménagement, perte de revenus, mobilité...). 

Avant de notifier une résiliation, il est donc essentiel de bien en anticiper tous les effets pour vérifier son opportunité et sa faisabilité. L'avis d'un expert en immobilier est souvent précieux.

Guy Hoquet répond à vos questions sur la résiliation dans l'immobilier

Oui, le locataire peut donner congé à tout moment sans justifier d'un motif légitime, que ce soit pour louer plus grand, acheter, se reloger ailleurs... Il doit juste respecter le délai de préavis et les formalités de notification selon que le bail porte sur la résidence principale (3 mois, réduit à 1 mois dans certaines zones tendues ou situations urgentes) ou sur un meublé (1 mois).
Oui, la perte d'emploi fait partie des motifs permettant au locataire de résilier le bail de sa résidence principale en respectant un préavis réduit à 1 mois (au lieu de 3 mois). Cette réduction bénéficie aussi à son conjoint en cas de perte d'emploi. Il faut en justifier par une attestation. Le bailleur ne peut pas s'y opposer mais il conserve ses autres droits (loyers dus, état des lieux, restitution du dépôt de garantie...).
Oui, la loi vous accorde un délai de rétractation de 10 jours après la signature d'une promesse unilatérale ou d'un compromis de vente d'un logement ancien. Pendant ce délai, vous pouvez vous rétracter sans motif ni pénalité, par simple lettre recommandée avec accusé de réception. Cette faculté est d'ordre public et toute clause contraire serait nulle. C'est une protection essentielle pour éviter les engagements prématurés.
Si votre agent immobilier refuse d'enregistrer votre résiliation du mandat de vente malgré une notification en bonne et due forme, vous pouvez : 
  •  Lui adresser une nouvelle notification par acte d'huissier pour acter votre volonté.  
  • Saisir le médiateur de la consommation de son réseau ou de sa fédération professionnelle pour trouver une solution amiable.  
  • Porter plainte auprès de la DGCCRF pour pratique commerciale trompeuse (maintien d'une annonce pour un bien qui n'est plus à vendre).  
  • Assigner l'agent en référé devant le tribunal pour faire constater la résiliation et obtenir une indemnité en cas de préjudice.    
Le mandat étant librement révocable par le mandant, le refus de l'agent est abusif et l'expose à des sanctions civiles et disciplinaires.

L'essentiel à retenir sur la résiliation dans l'immobilier

  1. La résiliation est l'acte juridique mettant fin de façon anticipée et définitive à un contrat immobilier (bail, mandat, assurance, prêt...), par la volonté d'une ou des parties. 
  2. Elle peut être amiable (accord mutuel), unilatérale (départ du locataire, révocation par le mandant...) ou motivée par un manquement ou un cas de force majeure. 
  3. Ses modalités (forme, délai, motifs) sont en général fixées par la loi ou le contrat. Elle suppose une notification écrite (LRAR, acte d'huissier...) et le respect d'un préavis. 
  4. Elle produit ses effets pour l'avenir en libérant les parties de leurs obligations réciproques (paiement, prestation...). Mais elle n'efface pas le passé et peut justifier des restitutions ou indemnités. 
  5. Elle a des conséquences pratiques (état des lieux, remise des clés, clôture du dossier...) et juridiques (perte de droits et de garanties...) à bien anticiper. Un conseil préalable est prudent. 
La résiliation est un terme fréquent des contrats immobiliers. Bien menée, elle permet de s'adapter aux changements de situation. Mal gérée, elle peut entraîner des litiges et des préjudices. D'où l'intérêt de maîtriser ses enjeux et ses démarches avec l'aide d'un professionnel. Bien résilier, c'est déjà bien préparer la suite !

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