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Vous avez peut-être déjà entendu parler de ces fameux "quartiers prioritaires" ou "QPV" qui défrayent régulièrement la chronique. Mais savez-vous vraiment ce qu'ils recouvrent et pourquoi ils existent ? Loin des clichés, les Quartiers Prioritaires de la Ville sont avant tout des territoires urbains en difficulté qui concentrent les inégalités sociales, économiques et territoriales.
À ce titre, ils bénéficient d'une attention particulière des pouvoirs publics et d'une batterie de mesures spécifiques pour réduire les écarts avec le reste de la ville : rénovation urbaine, développement économique, cohésion sociale, sécurité... C'est tout l'enjeu de la politique de la ville dont les QPV sont la cible prioritaire depuis 2015. Mais comment un quartier devient-il un QPV ? Combien en compte-t-on en France ?
Quelles sont leurs caractéristiques communes ? Et quels dispositifs s'y appliquent concrètement ? Explications par Guy Hoquet.
Qu'est-ce qu'un Quartier Prioritaire de la Ville (QPV) ?
Un Quartier Prioritaire de la Ville (QPV) est un territoire urbain qui présente les plus fortes concentrations de pauvreté et qui fait l'objet d'une intervention publique renforcée au titre de la politique de la ville. C'est la nouvelle dénomination des "zones urbaines sensibles" (ZUS) depuis la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine du 21 février 2014.
Les QPV sont définis par décret tous les 3 ans sur la base d'un critère unique : le revenu médian par habitant, qui doit être inférieur à 60% du revenu médian national. Concrètement, sont classés en QPV les quartiers de plus de 1000 habitants dont le revenu fiscal médian est inférieur à 12 700 € par an (donnée 2023).
Des quartiers de plus petite taille (minimum 500 habitants) peuvent être intégrés s'ils présentent des dysfonctionnements urbains particuliers (dégradation du bâti, infrastructures insuffisantes...). De même, les anciens quartiers ZUS non retenus restent en "veille active" et peuvent bénéficier de mesures de soutien pendant quelques années.
En 2023, on compte 1514 QPV en France métropolitaine et dans les DOM, soit environ 5,4 millions d'habitants (8% de la population). Ils se répartissent dans 859 communes dont 70% comptent moins de 10 000 habitants. Les régions les plus concernées sont l'Ile-de-France, les Hauts-de-France et Provence-Alpes-Côte-d'Azur.
Le périmètre exact de chaque QPV est fixé par le préfet de région, en concertation avec les élus locaux et les habitants. La liste et la cartographie officielles des QPV sont disponibles sur le site du ministère de la ville (www.ville.gouv.fr) et sur le Géoportail (www.geoportail.gouv.fr).
Exemple : Le quartier de la Goutte d'Or, dans le 18ème arrondissement de Paris, est classé QPV car son revenu médian (9 400 €/an) est inférieur de 48% à celui de la capitale (18 100 €/an). Il compte 24 000 habitants et cumule les difficultés : taux de pauvreté de 37%, taux de chômage de 19%, habitat dégradé... Il fait l'objet d'un important programme de rénovation urbaine.
Les caractéristiques des Quartiers Prioritaires de la Ville
Au-delà du critère de revenu, les QPV présentent des caractéristiques socio-économiques qui les distinguent des autres quartiers des agglomérations :
- Une surreprésentation des jeunes et des familles nombreuses : 42% des habitants ont moins de 25 ans (contre 30% en moyenne nationale) et 12% des ménages ont 5 personnes ou plus (contre 5%).
- Un très faible niveau de vie et de qualifications : le taux de pauvreté atteint 42% (contre 14% au niveau national) et 37% des 15-64 ans sont sans diplôme (contre 18%).
- Un fort taux de chômage et d'inactivité, surtout chez les jeunes et les femmes : 26% des actifs sont au chômage (contre 10% en moyenne) et 36% des 15-64 ans sont inactifs (contre 25%).
- Des conditions de logement dégradées malgré une forte proportion de HLM : 35% des logements sont suroccupés (contre 9% en France) et 64% des ménages sont locataires du parc social (contre 14%).
- Un niveau de délinquance et d'insécurité plus élevé que la moyenne, avec des poches de trafics et de violences urbaines.
- Un déficit d'équipements et de services publics de proximité (éducation, santé, transports...) et un tissu associatif fragilisé.
- Des discriminations persistantes, notamment à l'emploi et au logement, en raison de l'origine réelle ou supposée.
- Mais aussi des atouts souvent méconnus : une population jeune et diverse, un dynamisme entrepreneurial, des initiatives citoyennes, un esprit de solidarité...
Autant de défis et de potentiels que la politique de la ville cherche à prendre en compte de manière transversale et partenariale.
Les dispositifs spécifiques aux QPV
Les QPV font l'objet de mesures dérogatoires dans de nombreux domaines pour réduire les écarts avec les autres quartiers et favoriser leur développement équilibré. En voici quelques exemples :
- Urbanisme et logement : les QPV sont éligibles aux programmes de l'Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine (ANRU) qui finance des opérations lourdes de démolition-reconstruction, de résidentialisation, d'aménagement des espaces publics... Les bailleurs sociaux y bénéficient d'aides renforcées pour la construction et la réhabilitation de logements (TVA à taux réduit, exonérations fiscales...).
- Développement économique : les entreprises qui s'implantent ou embauchent dans les QPV peuvent bénéficier d'exonérations fiscales (impôt sur les bénéfices, cotisation foncière...) et sociales (cotisations patronales), ainsi que d'aides à l'investissement (subventions, prêts à taux zéro...). Des clauses d'insertion sont prévues dans les marchés publics pour favoriser l'emploi local.
- Cohésion sociale : les QPV sont prioritaires pour le déploiement des dispositifs de soutien à la parentalité, de réussite éducative, d'accès aux soins, de prévention de la délinquance... Des moyens supplémentaires sont alloués aux associations qui y interviennent (adultes-relais, postes FONJEP...).
- Participation des habitants : chaque QPV doit être doté d'un conseil citoyen composé d'habitants tirés au sort et de représentants des associations, qui est associé à l'élaboration et au suivi des projets. Des budgets participatifs et des maisons du projet permettent d'impliquer les citoyens dans la transformation de leur cadre de vie.
- Accès au droit : des points d'accès au droit et des maisons de la justice et du droit sont implantés dans les QPV pour faciliter l'accès à l'information et à l'accompagnement juridique des habitants (droit de la famille, droit du travail, droit des étrangers...).
Cette approche intégrée et territorialisée vise à mettre fin à la "politique de la ville en silos" et à mobiliser tous les acteurs autour d'un projet global de développement social et urbain. Elle s'incarne dans des contrats de ville signés entre l'État, les collectivités et leurs partenaires pour 6 ans.
Mais la politique de la ville ne se réduit pas aux quartiers : elle cherche aussi à relier les QPV au reste du territoire, à favoriser la mixité sociale et à lutter contre les effets de ségrégation. Un défi de taille qui suppose de changer de regard sur ces quartiers trop souvent stigmatisés.
Guy Hoquet répond à vos questions sur les QPV
Comment savoir si mon logement est situé dans un QPV ?
Quels sont les avantages d'habiter dans un Quartiers Prioritaires de la Ville ?
- Des aides au logement majorées (APL, ALF) pour les locataires du parc social ou privé.
- Des tarifs préférentiels pour les services publics locaux (cantines, crèches, transports...).
- Un accompagnement renforcé pour l'accès à l'emploi, à la formation, à la santé... grâce à des dispositifs ciblés.
- Des équipements et services de proximité rénovés ou créés dans le cadre des projets de rénovation urbaine.
- Un cadre de vie amélioré grâce aux opérations d'aménagement et de résidentialisation des espaces publics et privés.
Un propriétaire peut-il bénéficier d'aides pour rénover son logement dans un QPV ?
- Des subventions et prêts à taux zéro de l'Agence Nationale de l'Habitat (ANAH), sous conditions de ressources et de performance énergétique.
- Un taux de TVA réduit à 5,5% (au lieu de 20%) pour les travaux d'amélioration de la qualité énergétique.
- Des primes et bonus des collectivités locales dans le cadre des Opérations Programmées d'Amélioration de l'Habitat (OPAH) ou des Programmes d'Intérêt Général (PIG).
- Un crédit d'impôt de 25% (au lieu de 15%) pour les dépenses d'équipements d'économie d'énergie.
Les loyers sont-ils plafonnés dans les QPV ?
L'essentiel à retenir sur les Quartiers Prioritaires de la Ville
- Les Quartiers Prioritaires de la Ville (QPV) sont des territoires urbains qui concentrent les difficultés sociales et économiques et qui bénéficient d'une intervention publique renforcée au titre de la politique de la ville.
- Au nombre de 1514 en France, ils sont définis tous les 3 ans sur la base d'un critère unique de revenu (inférieur à 60% du revenu médian national) et d'une population minimale de 1000 habitants.
- Malgré leur diversité, les QPV présentent des caractéristiques communes : surreprésentation des jeunes et des familles nombreuses, faible niveau de vie et de qualifications, fort taux de chômage et d'inactivité, conditions de logement dégradées...
- Ils bénéficient de nombreux dispositifs spécifiques en matière de rénovation urbaine, de développement économique, de cohésion sociale, de participation des habitants... pour réduire les écarts avec les autres quartiers.
- Au-delà de ces mesures ciblées, la politique de la ville vise à décloisonner ces quartiers, à favoriser la mixité sociale et à lutter contre la ségrégation urbaine. Un enjeu majeur pour la cohésion nationale.
Au cœur de la fracture territoriale, les Quartiers Prioritaires de la Ville concentrent les défis mais aussi les espoirs d'une société plus juste et plus inclusive. Une chance pour la République de tenir sa promesse d'égalité !
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