Caution

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La caution : un engagement fort pour garantir le paiement d'une dette

Vous avez un proche qui recherche un financement ou un logement locatif mais qui n'a pas un dossier assez solide ? On va probablement vous demander de vous porter caution pour garantir le paiement des échéances en cas de défaillance.

Cet engagement personnel, aussi appelé cautionnement, est fréquent dans les contrats de prêt immobilier et de location. Il rassure le créancier (banque, propriétaire) qui aura un recours contre vous si le débiteur principal ne paie pas.

Mais à quoi vous engage exactement un cautionnement ? Quelles précautions prendre avant de le signer ? Et comment vous désengager si les choses tournent mal ? Les réponses de Guy Hoquet.

Définition : qu'est-ce qu'une caution ?

Une caution (ou cautionnement) est un contrat par lequel une personne, appelée "caution" ou "garant", s'engage envers un créancier à payer la dette d'un tiers appelé "débiteur principal" si celui-ci ne peut plus faire face à ses obligations.

La caution est donc une sûreté personnelle qui vient garantir l'exécution d'une obligation (remboursement d'un prêt, paiement d'un loyer...) au cas où le débiteur serait défaillant.

Le cautionnement se matérialise par un acte écrit qui peut prendre deux formes : 

  • L'acte sous seing privé : c'est un contrat rédigé et signé directement entre les parties (créancier, débiteur, caution) sans intervention d'un officier public. C'est la forme la plus courante pour les baux d'habitation. 
  • L'acte notarié (ou authentique) : c'est un contrat rédigé et signé en présence d'un notaire qui lui donne une "force exécutoire". Il permet une procédure de recouvrement accélérée en cas d'impayé. C'est souvent exigé par les banques pour les crédits immobiliers.

La caution est un contrat unilatéral : seule la caution s'engage envers le créancier, le débiteur principal n'a pas d'obligation directe envers elle.

Mais c'est aussi un contrat accessoire au contrat principal (prêt ou bail) : il suit les mêmes modalités (montant, durée, intérêts...) et ne peut exister sans lui. Si le contrat principal est nul, le cautionnement l'est aussi.

Exemple : Éric se porte caution du prêt immobilier de 200 000 € souscrit par son fils Julien pour acheter son premier appartement. Il signe un acte de cautionnement chez le notaire prévoyant qu'il devra rembourser les mensualités à la place de Julien si ce dernier ne peut plus payer. Le montant et la durée du cautionnement sont calqués sur ceux du prêt principal.

Les différents types de cautionnement

Il existe plusieurs formes de cautionnement selon l'étendue de l'engagement de la caution :

  • La caution "simple" : 
    • Le créancier doit d'abord poursuivre le débiteur principal pour obtenir le paiement avant de se retourner contre la caution. 
    • La caution peut invoquer le "bénéfice de discussion" pour obliger le créancier à épuiser toutes les procédures contre le débiteur avant de la solliciter. 
    • C'est un mécanisme de garantie peu utilisé car il alourdit le recouvrement pour le créancier. 
  • La caution "solidaire" : 
    • Le créancier peut demander le paiement directement à la caution, sans avoir à poursuivre préalablement le débiteur. 
    • La caution est tenue de la même manière que le débiteur, ils sont "co-obligés". 
    • C'est la forme de cautionnement la plus répandue (90% des cas) car elle offre une garantie maximale au créancier. 
  • La caution "conjointe" : 
    • Plusieurs personnes se portent caution ensemble et solidairement pour un même débiteur. 
    • Le créancier peut demander le paiement à n'importe laquelle des cautions, à charge pour elle de se retourner contre les autres co-cautions pour diviser la dette. 
    • C'est un schéma fréquent lorsque les parents se portent caution solidaire de leur enfant emprunteur ou locataire. 
  • La caution "limitée" : 
    • L'engagement de la caution est plafonné à un certain montant mentionné dans l'acte, quel que soit le montant final de la dette. 
    • C'est une sécurité pour la caution qui connaît d'avance sa perte maximale. 
    • Mais c'est rare en pratique, les créanciers préfèrent un engagement illimité. 
  • La caution "temporaire" : 
    • L'engagement de la caution est limité dans le temps, pour une durée définie dans l'acte. 
    • Au-delà de cette période, la caution est libérée même si la dette subsiste. 
    • C'est une protection utile pour la caution qui ne veut pas s'engager sur toute la durée d'un prêt ou d'un bail.

Au-delà de ces distinctions juridiques, la pratique a consacré deux grandes catégories de cautions selon la qualité du garant :

  • La caution "personnelle" : ce sont les particuliers (parents, amis...) qui se portent garants à titre privé et gratuit sur leurs deniers personnels. 
  • La caution "professionnelle" (ou institutionnelle) : ce sont des organismes spécialisés (banques, sociétés de cautionnement...) qui délivrent des garanties moyennant le paiement d'une commission par le débiteur. C'est plus sécurisant pour le créancier.

Le choix entre ces différents types de cautionnement dépend du montant et de la durée de l'engagement, des exigences du créancier et de la surface financière de la caution. Un conseil avisé est souvent nécessaire !

Les obligations et les risques du cautionnement

Se porter caution n'est pas un engagement anodin. Cela fait naître des obligations lourdes à la charge du garant :

  • Payer la dette à la place du débiteur si celui-ci est défaillant (impayé, faillite, décès...). La caution doit régler les échéances, les intérêts et les pénalités jusqu'à l'extinction complète de la dette. Son patrimoine personnel est mis à contribution. 
  • Informer le créancier de tout changement qui affecte sa capacité à honorer son engagement : baisse de revenus, divorce, déménagement... Sinon, elle reste tenue dans les termes d'origine. 
  • Justifier de ressources suffisantes pour couvrir la dette à garantir. Les créanciers exigent souvent que les revenus de la caution représentent 3 à 4 fois le montant des échéances. Un examen approfondi de sa situation financière est mené. 
  • Rembourser les autres cautions en cas de paiement conjoint et solidaire. La caution qui a payé doit diviser la charge avec les co-cautions, au prorata de leur part respective mentionnée dans l'acte (souvent à parts égales).

La caution s'expose donc à des risques significatifs en cas de défaut du débiteur principal :

  • Devoir mobiliser son épargne ou s'endetter pour payer la dette d'autrui et faire face aux éventuels frais de recouvrement (huissier, avocat...). 
  • Se faire saisir ses biens personnels (comptes bancaires, salaire, immobilier...) si elle ne peut pas régler les sommes réclamées par le créancier. 
  • Être inscrite au FICP (Fichier des Incidents de remboursement des Crédits aux Particuliers) pendant 5 ans si elle ne régularise pas les incidents de paiement caractérisés. Cela peut bloquer l'accès à un nouveau crédit ou à une location. 
  • Subir l'impact sur ses relations avec le débiteur cautionné, qui peut mal vivre l'appel en garantie et le "contrôle" de la caution sur sa situation. Un risque de brouille familiale ou amicale. 
  • Devoir justifier de la fin de son engagement pour pouvoir vendre ou donner un bien lui appartenant. Le notaire pourra demander une attestation de décharge.

C'est pourquoi il est crucial de bien mesurer sa capacité à payer et son degré de confiance envers le débiteur avant d'accepter un cautionnement. Mieux vaut décliner poliment qu'hypothéquer sa situation personnelle ! Le recours à une caution institutionnelle est parfois plus sage.

D'autant qu'une fois signé, un cautionnement est difficilement révocable de façon anticipée, sauf rares exceptions. Il faut attendre son terme contractuel, qui peut être très long (20-25 ans pour un prêt immobilier !).

Les voies de recours et de sortie du cautionnement

Malgré son côté contraignant et risqué, le cautionnement n'est pas une fatalité pour celui qui l'a consenti. Des aménagements légaux permettent d'en limiter la portée dans le temps ou d'en contester les effets :

  • Le cantonnement
    • Lors de la conclusion de l'acte de cautionnement, la caution peut en limiter l'étendue à une certaine somme ou une certaine durée. 
    • C'est un garde-fou utile si elle ne veut pas être engagée pour toute la durée ou le montant de la dette. 
    • Mais les créanciers y sont réticents car cela réduit leur garantie. 
  • L'information annuelle (art. L 313-22 du Code monétaire et financier) : 
    • Pour les cautionnements conclus au profit d'un établissement de crédit, celui-ci doit indiquer chaque année à la caution le montant du capital et des intérêts restant dus. 
    • À défaut d'information dans les 15 jours de l'échéance, la caution n'est plus tenue des intérêts échus depuis la précédente information. 
    • Un motif de libération partielle si la banque est négligente ! 
  • Le délai de prescription
    • L'engagement de la caution se prescrit comme toute dette civile par 5 ans à compter de la défaillance du débiteur (10 ans pour un cautionnement solidaire). 
    • Passé ce délai, le créancier ne peut plus agir en paiement contre la caution, sauf interruption du délai par une procédure. 
    • Mais c'est un motif de sortie incertain vu la durée de prescription. 
  • Le décès de la caution
    • Le décès de la caution personne physique n'éteint pas de plein droit son engagement, qui passe à ses héritiers. 
    • Mais ceux-ci ne sont tenus qu'à hauteur de l'actif successoral, sans engager leurs deniers personnels (sauf s'ils sont co-cautions). 
    • Le créancier devra déclarer sa créance à la succession dans les 12 mois suivant le décès. 
  • L'action en nullité / responsabilité
    • La caution peut demander l'annulation judiciaire de son engagement en invoquant un vice de consentement (erreur, dol, violence) ou un défaut d'information du créancier. 
    • Elle peut aussi rechercher la responsabilité de la banque si celle-ci a accordé un prêt excessif au débiteur au regard de ses capacités de remboursement. 
    • Mais ces cas de nullité sont rares et difficiles à prouver en pratique.

Face à ces possibilités d'aménagement limitées, le plus efficace reste de bien peser le pour et le contre avant de se porter caution, en discutant franchement avec le débiteur de sa situation et en négociant avec le créancier des garanties moins risquées (nantissement, hypothèque...).

Et en cas d'appel, il faut réagir vite et ne pas rester seul : contacter le débiteur pour comprendre son défaut, vérifier le montant exact de la dette, négocier des délais de paiement avec le créancier, faire appel aux services sociaux ou aux commissions de surendettement...   

Le cautionnement est un service rendu par amitié ou solidarité. Il ne doit pas devenir un piège financier et relationnel sans issue !

Guy Hoquet répond à vos questions sur la caution

Non, une personne frappée d'interdiction bancaire (suite à un chèque sans provision) ne peut pas valablement se porter caution. Son engagement serait nul. En effet, le Code monétaire et financier prohibe la conclusion de tout cautionnement par une personne sous le coup d'une interdiction d'émettre des chèques. Cela vise à protéger les particuliers déjà en difficulté financière.    
Il en va de même pour les personnes placées sous un régime de protection (tutelle, curatelle...) qui n'ont plus la capacité juridique de consentir seules à un cautionnement. Il faut l'autorisation du juge des tutelles.
En revanche, une personne fichée au FICP (suite à un incident de crédit) conserve la faculté de se porter caution. Son engagement reste valable même s'il est fortement déconseillé vu son surendettement !
La sagesse est de ne cautionner que si on a une situation financière saine et stable pour pouvoir faire face au pire scénario. Votre conseiller bancaire peut vous aider à évaluer votre capacité à être caution. Écoutez ses mises en garde !
Non, la caution d'un bail d'habitation n'a pas le droit d'entrer dans le logement loué sans l'accord du locataire. Même en cas d'impayés de loyers ou de travaux !
Le cautionnement ne donne aucun droit de regard direct sur la gestion du bail. Seul le locataire, titulaire du droit au bail, peut autoriser un tiers à pénétrer dans le logement.
La caution peut en revanche demander au bailleur de l'informer de l'état du logement au moment de l'état des lieux d'entrée et de sortie, ainsi que des éventuelles dégradations ou impayés en cours de bail. Le bailleur n'est pas obligé d'y donner suite mais c'est une pratique courtoise.
La caution peut aussi demander au locataire de lui transmettre une copie de l'état des lieux et de l'attestation d'assurance habitation. Cela lui permet de suivre à distance l'entretien du bien et la responsabilité du locataire.
En cas de conflit, seule une décision de justice (résiliation du bail, expulsion...) peut autoriser la caution à accéder au logement contre le gré du locataire, et uniquement pour récupérer le bien, pas pour contrôler son usage.
Moralité : quand on se porte caution, mieux vaut entretenir une relation de confiance et de dialogue avec le locataire cautionné. C'est la meilleure façon de prévenir les dérives et les mauvaises surprises !
Si vous recevez une mise en demeure de payer de la banque suite à la défaillance du débiteur cautionné, voici la conduite à tenir :
  1. Ne paniquez pas mais ne restez pas sans réagir. Vous avez un délai de 15 à 30 jours pour régulariser la situation avant le déclenchement d'une procédure contentieuse. 
  2. Contactez rapidement le débiteur pour comprendre les raisons de son défaut de paiement (perte d'emploi, séparation, maladie...) et voir avec lui les solutions pour y remédier (plan d'apurement, report d'échéances...). 
  3. Vérifiez le montant exact de la dette réclamée par la banque au regard du tableau d'amortissement initial. Assurez-vous qu'elle ne vous réclame que les sommes dues au titre du cautionnement (capital, intérêts, frais...), pas plus.
  4. Etudiez votre capacité contributive pour savoir si vous pouvez régler seul la dette ou s'il vous faut demander un étalement dans le temps. N'hésitez pas à solliciter l'aide de votre entourage ou d'un professionnel du chiffre.
  5. Revenez vers la banque avec une proposition réaliste de remboursement (mensualités, durée...). La plupart des établissements préfèrent une solution amiable à une procédure judiciaire longue et coûteuse. 
  6. Notifiez votre accord par écrit à la banque et au débiteur, et honorez scrupuleusement votre engagement. Vous éviterez ainsi de nouvelles pénalités. 
  7. N'hésitez pas à faire intervenir un médiateur (Banque de France, association de consommateurs...) en cas de blocage dans la négociation. Il favorisera le dialogue et la recherche d'un compromis.   
L'essentiel est de ne pas fuir vos responsabilités et d'affronter la difficulté en trouvant un terrain d'entente entre le créancier et le débiteur. C'est le meilleur moyen de limiter la casse financière et relationnelle d'un cautionnement qui tourne mal !

L'essentiel à retenir sur la caution

  1. La caution (ou cautionnement) est un contrat par lequel un tiers s'engage envers un créancier à payer la dette d'un débiteur si celui-ci est défaillant. C'est une sûreté personnelle fréquente dans le crédit et la location. 
  2. Il existe plusieurs formes de cautionnement selon l'étendue de l'engagement : simple, solidaire, conjointe, limitée, temporaire. La caution solidaire est la plus répandue car elle offre le maximum de garanties au créancier. 
  3. On distingue la caution personnelle (particuliers) qui s'engage à titre gratuit et la caution professionnelle (banques, assurances) qui se porte garante moyennant commission. Cette dernière est plus sécurisante. 
  4. En contrepartie, la caution doit remplir des obligations (paiement de la dette, information du créancier, justification de ressources...) et supporter des risques financiers (mobilisation d'épargne, saisies...) et personnels (fichage FICP, brouille relationnelle...). 
  5. Des aménagements légaux permettent de limiter l'engagement (cantonnement, prescription, décès de la caution...) ou de le contester en justice (nullité, responsabilité du créancier...). Mais mieux vaut bien peser les risques avant de se porter caution et entretenir le dialogue en cas d'appel !
Le cautionnement est un acte de confiance et de générosité envers un proche qui a besoin d'un coup de pouce pour réaliser un projet. Mais c'est un service à rendre avec prudence et clairvoyance car il peut vite tourner au boulet financier et affectif. A manier avec modération !

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