La copropriété : un mode d'habitat collectif à bien appréhender
Vous envisagez d'acheter un appartement dans une résidence ou vous vivez déjà dans un immeuble collectif ? Vous êtes sûrement concerné par le régime de la copropriété, qui organise la vie de la plupart des immeubles divisés en lots.
Mais qu'est-ce que la copropriété exactement ? Comment fonctionne-t-elle au quotidien ?
Quelles sont les instances qui la gouvernent ? Et quels sont les droits et obligations de
chaque copropriétaire ? Guy Hoquet vous apporte son expertise.
Qu'est-ce qu'une copropriété ?
Une copropriété est un immeuble bâti ou un ensemble immobilier dont la propriété est répartie entre plusieurs personnes, appelées copropriétaires. Chaque copropriétaire est propriétaire exclusif de son lot privatif (appartement, cave, parking...) et copropriétaire des parties communes (sol, murs, toits, escaliers, ascenseurs...).
Les règles de fonctionnement et d'organisation de la copropriété sont définies par la loi du 10 juillet 1965 et son décret d'application, ainsi que par le règlement de copropriété propre à chaque immeuble.
Ce règlement, établi par un notaire, détermine notamment :
● La destination de l'immeuble (usage d'habitation, professionnel, mixte...)
● La description des parties privatives et communes
● Les conditions d'usage et de jouissance des parties communes
● La répartition des charges entre copropriétaires (tantièmes)
● Les règles de fonctionnement des instances de la copropriété
Il est adopté à la naissance de la copropriété et s'impose à tous les copropriétaires présents et futurs. Il peut être modifié par un vote en assemblée générale selon des règles de majorité spécifiques.
La vie de la copropriété est rythmée par les décisions collectives prises en assemblée générale, les appels de fonds du syndic pour financer les charges, les travaux d'entretien et d'amélioration des parties communes...
Exemple : Laura achète un appartement de 60 m² au 2e étage d'une résidence récente. Elle devient propriétaire exclusive de son lot (qui comprend l'appartement et une cave) et copropriétaire des parties communes de l'immeuble (hall d'entrée, escaliers, ascenseur, local vélos...) à hauteur de 15/1000e (tantièmes définis dans le règlement de copropriété). Elle devra participer aux décisions et aux charges de la copropriété.
Les organes de gestion et de décision de la copropriété
Toute copropriété est administrée par trois organes principaux :
1. Le syndicat des copropriétaires, qui regroupe l'ensemble des copropriétaires. C'est lui qui prend les décisions importantes lors des assemblées générales (AG) : budget prévisionnel, travaux, élection du conseil syndical... Chaque copropriétaire dispose d'un nombre de voix proportionnel à ses tantièmes.
2. Le conseil syndical, élu parmi les copropriétaires pour une durée déterminée. C'est un organe consultatif qui contrôle et assiste le syndic. Il prépare le budget, surveille les comptes, donne son avis sur les travaux. Ses membres sont bénévoles et se réunissent plusieurs fois par an. La constitution d'un conseil syndical est obligatoire, sauf dans 3 cas :
● Lorsque le syndicat des copropriétaires renonce à constituer un conseil syndical par un vote en assemblée générale des copropriétaires à la double majorité dite de l'article 26.
● Lorsqu’aucun candidat ne se présente ou n'obtient la majorité exigée.
● Dans les petites copropriétés, c'est-à-dire celles comportant au maximum 5 lots à usage de logements, de bureaux ou de commerces, ou lorsque le budget prévisionnel moyen du syndicat des copropriétaires sur une période de 3 exercices consécutifs est inférieur à 15 000 €.
3. Le syndic, personne physique ou morale chargée de la gestion courante de la copropriété. Il peut être professionnel ou bénévole. Il exécute les décisions d'AG, établit le budget, gère la trésorerie et les comptes, organise les AG et le conseil syndical. Il est le représentant légal du syndicat. Il est désigné par l'AG et sa mission est encadrée par un contrat. Sa rémunération est une charge courante payée par les copropriétaires.
D'autres intervenants gravitent autour de la copropriété : gardien, employés d'immeuble, entreprises de nettoyage et de maintenance, architecte, comptable...
Bon à savoir : un copropriétaire peut aussi être membre du conseil syndical s'il est élu, voire syndic bénévole s'il est désigné par l'AG. Il devra alors respecter le principe de séparation entre ses différentes "casquettes".
Les charges de copropriété : un budget à surveiller
En plus de son lot privatif, chaque copropriétaire doit participer financièrement aux charges de la copropriété, c'est-à-dire aux dépenses liées aux parties et équipements communs.
Ces charges sont de deux ordres :
● Les charges courantes (ou charges de fonctionnement), qui couvrent les dépenses régulières : eau, électricité des communs, entretien, assurances, rémunération du gardien et du syndic... Elles sont payées par provisions trimestrielles avec une régularisation annuelle en fonction des dépenses réelles.
● Les charges exceptionnelles (ou charges travaux), qui financent les dépenses ponctuelles votées en AG : réfection de la toiture, ravalement de façade, mise aux normes de l'ascenseur... Elles font l'objet d'un appel de fonds spécifique, payable en une ou plusieurs fois.
Le montant des charges est réparti entre copropriétaires selon une clé de répartition fixée dans le règlement de copropriété (tantièmes). Elle tient compte généralement de la superficie et de la situation du lot (étage, exposition...).
Il faut savoir que le non-paiement des charges pendant plus de 2 trimestres constitue un motif de saisie immobilière du lot par le syndic avec autorisation de l'AG, afin de récupérer les sommes dues. Une procédure lourde qui fragilise toute la copropriété.
C'est pourquoi il est important de s'assurer de sa capacité à payer les charges avant d'acheter en copropriété, et d'intégrer cette dépense incompressible dans son budget. Demandez une estimation précise au syndic ou au vendeur et étudiez les comptes des derniers exercices pour anticiper les évolutions.
Bon à savoir : certaines charges peuvent être récupérées auprès des occupants (locataires) d'un lot : entretien, menues réparations, électricité... Mais pas les travaux de rénovation qui restent à la charge du copropriétaire bailleur.
Les règles de majorité et de contestation des décisions d'AG
Les décisions prises en assemblée générale (AG) doivent respecter des règles de majorité différentes selon leur nature et leur importance :
● Majorité simple (article 24) : majorité des voix exprimées. Pour les décisions courantes : budget prévisionnel, travaux d'entretien courant...
● Majorité absolue (article 25) : majorité des voix de tous les copropriétaires. Pour les décisions plus importantes : travaux d'amélioration, désignation du syndic...
● Double majorité (article 26) : majorité absolue absence d'opposition d'un groupe minoritaire. Pour les décisions modifiant la répartition des charges ou la destination de l'immeuble.
● Unanimité (article 30) : accord de tous les copropriétaires sans exception. Pour les décisions changeant la destination ou les conditions de jouissance de l'immeuble.
Un procès-verbal retrace le contenu et le résultat des votes de chaque AG. Il est notifié à tous les copropriétaires.
En cas de désaccord avec une décision d'AG, un copropriétaire peut la contester en justice dans un délai de 2 mois suivant la notification du PV. Il doit prouver une irrégularité de forme (convocation, majorité...) ou de fond (abus de majorité, décision contraire au règlement...).
Mais la contestation, qui doit être portée devant le tribunal judiciaire, ne suspend pas l'exécution de la décision, sauf accord du juge. Des frais d'avocat sont à prévoir.
C'est pourquoi il est souvent préférable de régler les litiges de copropriété par le dialogue et la négociation plutôt que par la voie judiciaire. Le recours préalable à un médiateur peut favoriser un accord amiable.
Bon à savoir : un copropriétaire défaillant peut se voir privé de son droit de vote en AG s'il ne règle pas ses charges après une mise en demeure du syndic. Une incitation à se mettre à jour !
Les avantages et contraintes de la copropriété
Vivre en copropriété présente des avantages indéniables :
● La possibilité d'accéder à la propriété à moindre coût par rapport à une maison individuelle, surtout dans les grandes villes où le foncier est cher.
● La mutualisation des coûts d'entretien, d'assurance et d'amélioration de l'immeuble via le paiement des charges.
● La sécurité collective apportée par les équipements communs (digicode, interphone, gardien...) et le contrôle des allées et venues.
● La présence de services collectifs : ascenseur, local vélos, espaces verts, vide- ordures...
● L'application de règles de vie commune qui garantissent la tranquillité et le confort de chacun : horaires, hygiène, respect du voisinage...
Mais la copropriété comporte aussi des contraintes à ne pas négliger :
● L'obligation de participer aux charges courantes et exceptionnelles, dont le montant peut varier fortement d'une année à l'autre selon les travaux votés et l'état de l'immeuble. Un poste de dépense incompressible.
● Le respect du règlement de copropriété qui encadre les usages des parties privatives et communes : interdiction de certaines activités, restriction des travaux intérieurs, limitation des animaux...
● L'application des décisions collectives prises en AG (travaux, aménagements, changement de syndic...) même en cas de désaccord individuel. La loi de la majorité s'impose.
● Les contraintes de la vie en collectivité : bruits, odeurs, interactions avec les voisins... qui peuvent générer des tensions et des conflits.
● La lenteur et la complexité du processus décisionnel en AG, où les intérêts divergents s'expriment (propriétaires occupants, bailleurs, investisseurs...).
● La difficulté à réaliser des travaux privatifs touchant aux parties communes (création d'une terrasse, modification de façade...) qui nécessitent un accord préalable de l'AG.
Avant d'acheter en copropriété, il est donc essentiel de lire attentivement le règlement, de participer aux AG, de s'impliquer dans la vie et la gestion de l'immeuble. Une façon de mieux s'approprier ce mode d'habitat collectif aux règles bien spécifiques.
Guy Hoquet répond à vos questions sur la copropriété
Puis-je louer mon appartement en copropriété sur Airbnb ?
Ai-je le droit de ne pas assister aux assemblées générales ?
Que faire en cas de troubles de voisinage répétés en copropriété ?
Puis-je m'opposer à des travaux votés en AG ?
L’essentiel à retenir
1. La copropriété est un mode d'habitat collectif où chacun est propriétaire de son lot privatif et copropriétaire des parties communes. Son fonctionnement est régi par la loi du 10 juillet 1965 et le règlement de copropriété.
2. Ses organes de gestion sont le syndicat des copropriétaires qui prend les décisions en AG, le conseil syndical qui contrôle la gestion et le syndic qui exécute les décisions et administre l'immeuble.
3. Chaque copropriétaire paie des charges pour l'entretien, les réparations et les travaux des parties communes. Leur répartition est fixée dans le règlement. Leur non-paiement pendant 2 trimestres peut entraîner la saisie du lot.
4. Les décisions en AG sont prises selon des règles de majorité différentes en fonction de leur nature. Un copropriétaire peut les contester en justice sous 2 mois s'il les estime irrégulières ou abusives.
5. Vivre en copropriété permet d'accéder à la propriété à moindre coût et de mutualiser les dépenses. Mais cela implique de respecter les règles de vie collective, d'accepter les décisions majoritaires et de s'impliquer dans la gestion. Un équilibre à trouver !