Amortissement

Amortissement

L'amortissement : un outil de gestion pour étaler le coût d'un bien durable

Vous êtes chef d'entreprise et vous investissez dans des biens durables pour votre activité (machines, véhicules, mobilier...) ? Vous avez acheté un bien immobilier que vous mettez en location ? Dans les deux cas, vous allez devoir "amortir" ces biens, c'est-à-dire répartir leur coût d'acquisition sur plusieurs années.

L'amortissement est une notion centrale de la comptabilité et de la fiscalité. Il permet de prendre en compte la dépréciation progressive des actifs de l'entreprise et de déduire fiscalement une partie de leur coût chaque année. C'est aussi un levier de gestion financière pour lisser le résultat et optimiser la rentabilité.

Mais comment fonctionne concrètement un amortissement ? Quelles sont les méthodes de calcul et les règles fiscales à connaître ? Et quels sont ses enjeux stratégiques ? Explications par Guy Hoquet.  

Définition : qu'est-ce que l'amortissement ?

L'amortissement est un mécanisme comptable et fiscal qui consiste à répartir le coût d'acquisition d'un bien durable sur sa durée probable d'utilisation, pour tenir compte de sa dépréciation progressive. C'est une charge calculée qui vient diminuer le résultat de l'entreprise chaque année.

Plus précisément, l'amortissement concerne les actifs immobilisés de l'entreprise, c'est-à-dire les biens :

  • ayant une valeur économique positive
  • destinés à servir de façon durable à l'activité (> 1 an)
  • dont l'utilisation est susceptible de se déprécier avec le temps

On y trouve principalement :

  • les immobilisations corporelles : terrains, constructions, installations techniques, matériel, outillage, mobilier...
  • les immobilisations incorporelles : fonds commercial, brevets, licences, logiciels...

Sont exclus de l'amortissement :

  • les biens de faible valeur unitaire (
  • les biens non dépréciabes par nature (ex : oeuvres d'art)
  • les biens non séparables d'un autre bien (ex : aménagements d'un terrain)

Exemple : Une entreprise achète un véhicule utilitaire à 20 000 € HT. Elle décide de l'amortir sur 5 ans. Chaque année, elle constatera une dotation aux amortissements de 4 000 € (20 000 / 5) qui viendra en charge dans son compte de résultat. Au bout des 5 ans, le véhicule sera amorti et aura une valeur nette comptable nulle (coût d'acquisition - total des amortissements). L'entreprise pourra alors le remplacer.

Les méthodes de calcul de l'amortissement

Il existe 3 principales méthodes de calcul d'un amortissement :

  1. Amortissement linéaire (ou constant)
  • C'est la méthode la plus simple et la plus courante.
  • Elle consiste à répartir le coût du bien en parts égales sur sa durée d'utilisation prévue.
  • La formule est : Annuité d'amortissement = Valeur d'origine / Durée
  • Exemple : Pour un bien de 10 000 € amorti sur 5 ans, l'annuité sera de 2000 € (10 000 / 5). 
  1. Amortissement dégressif
  • Cette méthode consiste à appliquer un taux dégressif (multiple du taux linéaire) sur la valeur nette comptable du bien à la fin de chaque exercice.
  • La base se réduit ainsi chaque année, ce qui concentre les amortissements sur les premières années.
  • La formule est : Annuité = Valeur nette comptable x Taux dégressif
  • Le taux dégressif est égal à 1,25 / 1,75 / 2,25 fois le taux linéaire, selon la durée d'usage du bien.
  • Un amortissement linéaire minimum est pratiqué quand l'annuité dégressive devient inférieure.
  • Exemple : Pour un bien de 10 000 €, sur 5 ans, avec un taux dégressif de 40% (2 x 20%), les annuités seront : Année 1 = 4000 € (40% x 10 000) Année 2 = 2400 € (40% x 6000) Année 3 = 1440 € (40% x 3600)...
  1. Amortissement par unités d'oeuvre (ou d'usage)
  • Cette méthode consiste à amortir le bien selon son degré d'utilisation réel (heures, kilomètres...) et non sa durée de vie.
  • La base amortissable est répartie en fonction d'unités d'oeuvre prévisionnelles.
  • La formule est : Annuité = Coût unitaire x Nombre d'unités de l'exercice avec Coût unitaire = Valeur d'origine / Nombre total d'unités
  • Exemple : Pour une machine de 100 000 €, prévue pour produire 500 000 pièces, le coût unitaire est de 0,20 €. Si elle produit 50 000 pièces la 1ère année, l'annuité sera de 10 000 € (0,20 x 50 000).

Le choix de la méthode est libre mais doit être cohérent avec la nature du bien et son mode d'utilisation. Il est définitif (sauf exception) et doit respecter le principe de permanence des méthodes.

La durée d'amortissement peut être fixée selon :

  • les usages professionnels, par type de bien (barèmes indicatifs)
  • la réalité économique propre à l'entreprise (obsolescence, projet...)
  • les règles fiscales (durées minimales et maximales selon la nature des biens)

En principe, l'amortissement commence à la date de mise en service du bien (et non d'acquisition).

Un plan d'amortissement détaillant les annuités est établi pour chaque bien entrant dans l'actif de l'entreprise. Il permet de suivre l'évolution de sa valeur nette comptable.

Les règles fiscales et les enjeux de gestion de l'amortissement

Au plan fiscal, l'amortissement constitue une charge déductible du résultat imposable de l'entreprise, dans la limite des règles du Code général des impôts.

Les principales règles sont :

  • l'obligation d'inscrire les amortissements en comptabilité
  • le respect des durées minimales et maximales d'amortissement, fixées par type de biens (ex : 5 à 10 ans pour le matériel, 20 à 50 ans pour les bâtiments...)
  • la possibilité d'adopter un mode dégressif pour certains biens (matériel, outillage...) avec des coefficients et des seuils
  • le plafonnement des amortissements différés en période déficitaire
  • la possibilité d'amortissements réputés différés en période déficitaire (non déductibles)
  • l'impossibilité de réviser un plan d'amortissement sauf circonstances exceptionnelles
  • la reprise des amortissements pour le calcul de la plus-value en cas de cession du bien

Ainsi, l'amortissement permet d'optimiser la fiscalité en lissant le bénéfice imposable et en anticipant les charges. C'est aussi un outil de gestion financière qui permet :

  • d'assurer le renouvellement des investissements (en mettant en réserve les amortissements)
  • de mesurer la rentabilité des actifs (taux de rendement, retour sur investissement)
  • de suivre la valeur économique réelle de l'entreprise (différente de sa valeur comptable)
  • d'évaluer le risque d'obsolescence des équipements stratégiques

Dans le secteur immobilier, l'amortissement est aussi un outil d'optimisation fiscale et de rendement pour les investisseurs qui louent des biens :

  • Seuls les composants amortissables du bien (construction, gros équipements...) peuvent générer une charge déductible des loyers, pas le terrain.
  • Des règles spécifiques s'appliquent selon le mode de détention (impôt sur les sociétés ou revenus fonciers) et le type de bien (neuf ou ancien).
  • Certains dispositifs de défiscalisation (Pinel, Malraux, Censi-Bouvard...) permettent des amortissements majorés sous conditions.
  • L'amortissement impacte le calcul de la plus-value lors de la revente (depuis 2004).

La stratégie d'amortissement doit donc être finement étudiée pour concilier rendement locatif, économie d'impôt et objectif de revente, sans tomber dans l'abus de droit. Un conseil expert s'impose !

Guy Hoquet répond à vos questions sur l'amortissement

Oui, un bien d'occasion peut être amorti s'il est destiné à être utilisé durablement par l'entreprise. Sa base amortissable sera son coût d'acquisition, pas sa valeur à neuf. Sa durée d'amortissement sera sa durée normale d'utilisation résiduelle, dans les limites légales.
Si le bien est cédé avant la fin de son plan d'amortissement, l'entreprise doit sortir le bien de l'actif pour sa valeur nette comptable (valeur brute - total des amortissements). Elle peut constater une plus ou moins-value (prix de cession - VNC) qui sera réintégrée ou déduite du résultat fiscal.
Les travaux réalisés sur un immeuble locatif peuvent être amortis s'ils relèvent de grosses réparations (au-delà de l'entretien courant) ou s'ils constituent des composants dissociables (toiture, chaudière...). Les durées d'amortissement suivent la nature des travaux (15 à 60 ans).
Oui, pour les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés (IS), l'amortissement des biens inscrits à l'actif est obligatoire. Il doit être constaté chaque année, même en cas de déficit (amortissements réputés différés). Pour les entreprises à l'impôt sur le revenu (IR), c'est une faculté.

L'essentiel à retenir sur l'amortissement

  1. L'amortissement est un mécanisme comptable et fiscal qui permet d'étaler le coût d'acquisition d'un bien durable sur sa durée probable d'utilisation, en constatant une charge annuelle.
  2. Il s'applique aux actifs immobilisés corporels et incorporels d'une entreprise ou d'un investisseur immobilier, à l'exclusion des biens non amortissables par nature.
  3. Il peut être calculé de façon linéaire (parts égales), dégressive (taux dégressif) ou par unités d'œuvre (selon l'usage réel). Le choix de la méthode et de la durée dépend de la nature du bien et des règles fiscales.
  4. C'est une charge déductible du résultat fiscal qui permet d'optimiser l'impôt, mais aussi un outil de gestion pour assurer le renouvellement des investissements et mesurer leur rentabilité.
  5. Dans l'immobilier locatif, l'amortissement ne porte que sur la construction et certains composants (pas le terrain). Il suit des règles spécifiques selon le régime fiscal et le type de bien, et interagit avec le calcul de la plus-value.

L'amortissement est donc un levier puissant mais complexe de la gestion d'entreprise et de l'investissement immobilier. Bien le maîtriser suppose une bonne compréhension des enjeux comptables, fiscaux et économiques. Le conseil d'un expert est souvent nécessaire pour bâtir une stratégie sur mesure.

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